je sors justement d’une projection de “uncanny terrains”, un documentaire (pas encore terminé) sur l’agriculture (bio) dans la région de fukushima.Ca commence par des éleveurs qui refusent d’abandonner leur troupeau dans la zone de protection autour de la centrale, et qui vont les nourrir en bravant l’interdiction d’entrer, et ça continue sur les agriculteurs qui continuent à faire pousser leur riz bio dans une région où il devient de facto invendable.Il y a quelques belles polémiques qui tournent justement toutes autour de ce “seuil”.Combien de Becquerel, combien de Sieverts, pour vivre, pour habiter, pour se nourrir sans risque, etc.Les seuils légaux se mettent à redistribuer tous les espoirs et toutes les luttes.D’un côté les agriculteurs qui pensent que leur riz peut être consommer, car il est sous le seuil de toxicité.De l’autre ceux qui refusent l’idée de seuil, et refusent d’acheter les produits en provenance de la zone, et dénoncent les agriculteurs… qui eux dénoncent (on les comprendra plus facilement) TEPCO, etc.Tous sont fixés sur les seuils, même si c’est pour dire qu’il n’y en a pas…Les activistes anti-nucléaires accusent les agriculteurs d’être des meurtriers,et exigent une alimentation pure, les agriculteurs ne peuvent plus produire du pur, et montrent qu’ils sont en grande partie en-dessous des seuils.Les agriculteurs exigent donc qu’on les considère comme anti-nucléaires, comme des victimes, mais aussi comme apportant des solutions positives à travers leur travail. Car là où ça devient intéressant, c’est quand les agriculteurs se mettent à réfléchir à leur rôle dans la dépollution des sols, à la différence entre agriculture bio (avec une vie organique dans le sol)et agriculture intensive sur l’absorption de césium, à que faire pousser pour que le sol puisse être à nouveau cultivé dans des années, sans risque.Les autorités sont bien entendu aveugles à ces arguments, et ne voient que le seuil, qui fixe aussi leurs responsabilité en cas de pollution alimentaire.Mais eux continuent à inventer des techniques pour dépolluer, pour filtrer l’eau, bref, vivre dans un monde impur.Et les agriculteurs se mettent alors à travailler ensemble, déclarent qu’ils se voyaient souvent avant pour régler les papiers, mais qu’ils sont maintenant beaucoup plus intéressés de se voir, pour vraiment échanger, penser ensemble, etc.Ils se mettent à repenser le paysage, non pas comme abstrait, mais comme ce qui a été toujours modifié par leur pratique.